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HISTOIRE, PATRIMOINE, PEINTURE, SCULPTURE, PERFORMANCE,

VALADON & SES CONTEMPORAINES  PEINTRES ET SCULPTRICES

VALADON & SES CONTEMPORAINES  PEINTRES ET SCULPTRICES
VALADON & SES CONTEMPORAINES  PEINTRES ET SCULPTRICES
VALADON & SES CONTEMPORAINES  PEINTRES ET SCULPTRICES
VALADON & SES CONTEMPORAINES  PEINTRES ET SCULPTRICES
VALADON & SES CONTEMPORAINES  PEINTRES ET SCULPTRICES
VALADON & SES CONTEMPORAINES  PEINTRES ET SCULPTRICES
VALADON & SES CONTEMPORAINES  PEINTRES ET SCULPTRICES

1880-1940

Prolongation exceptionnelle jusqu’au 5.09.21 !

https://visite-virtuelle.immersivr.fr/Exposition-VALADON-et-ses-contemporaines-Monast%C3%A8re-de-BROU/index.htm

 

Le monastère royal de Brou organise une exposition consacrée à Suzanne Valadon (1865 -1938) et aux autres artistes féminines de sa génération, actives entre 1880 et 1940. Une exposition qui révèle, pour la première fois en France, le rôle des femmes dans l’explosion artistique française au tournant du 20e siècle.

Comment devenir artiste lorsqu’on est née femme, à une époque où celles qui appartiennent au «deuxième sexe», dénuées de tout droit civique, ne peuvent accéder à l’École nationale des Beaux-Arts et sont priées de se cantonner à la sphère domestique ? C’est au tournant des 19e  et 20e  siècles que les femmes peintres et sculptrices vont lutter pour être reconnues comme des artistes à part entière, passant comme Suzanne Valadon du statut de modèle à celui de peintre accomplie.

Autour de la figure de Suzanne Valadon, l’exposition met en lumière les artistes de son époque et questionne à travers elles l’accès à la formation, les réseaux artistiques auxquels elles appartiennent, les sujets dont elles s’emparent et leur contribution aux mouvements d’avant-garde… dans une société où la place de la femme n’est pas égale à celle de l’homme.

L’exposition réunira près de 50 artistes : célèbres comme Camille Claudel, Marie Laurencin, Sonia Delaunay, Séraphine de Senlis ou Tamara de Lempicka, et d’autres moins connues ou parfois oubliées par la postérité.

Dévoilant une centaine d’œuvres, cette exposition permettra au public d’appréhender au mieux le rôle et l’influence de ces femmes artistes à l’assaut de la « Modernité ».

À chacune de ses expositions, le monastère royal de Brou propose une programmation culturelle dédiée et pour tous les publics : visites commentées, cycle de conférences, ateliers de pratiques artistiques, rendez-vous en famille… Un parcours parallèle sera créé dans les collections permanentes du musée afin de mettre en valeur les œuvres des femmes artistes déjà présentes.

En écho à l’histoire du monument et de sa fondatrice Marguerite d’Autriche (1480 - 1530), le monastère royal de Brou met une fois de plus les femmes à l’honneur. L’exposition «Valadon et ses contemporaines» vient clôturer un cycle dédié aux femmes, après les expositions «Marie-Madeleine, la Passion révélée»

(2017) et «Voilé.e.s / Dévoilé.e.s» (2019).

Exposition organisée en partenariat avec le BAL – Musée des Beaux-Arts de Limoges et produite par la Ville de Bourg-en-Bresse et le Centre des monuments nationaux.

 

PARCOURS DE L’EXPOSITION

Ouverture

Pour la première fois en France, cette exposition permet de découvrir la contribution des artistes femmes à l’extraordinaire effervescence artistique des années 1880-1940. Au-delà de la figure majeure de Suzanne Valadon, qui passa de façon emblématique du statut de modèle passif à celui d’artiste agissante, elles furent nombreuses, parfois célèbres de leur vivant puis oubliées par la postérité, à s’unir et lutter pour gagner le droit d’être des créatrices à part entière.

«Ce dont j’ai envie, c’est la liberté de se promener tout seul, d’aller, de venir, de s’asseoir sur les bancs du jardin des Tuileries et surtout le Luxembourg, de s’arrêter aux vitrines artistiques, d’entrer dans les églises, les musées, de se promener le soir dans les vieilles rues ; voilà ce que j’envie et voilà la liberté sans laquelle on ne peut pas devenir un vrai artiste.

[…] Si on élevait les femmes de la même manière que les hommes, l’inégalité que je déplore serait nulle et il ne resterait que celle qui est inhérente à la nature même. »

Marie Bashkirtseff, peintre et sculptrice,

Journal, 2 janvier 1879

 

LA FORMATION ET LA DIFFUSION POUR LES ARTISTES FEMMES VERS 1900

« Les artistes femmes sont présentes dans les collections du musée depuis sa son installation à Brou en 1922. Cette exposition permettra aux visiteurs de découvrir ce que l’Art moderne doit aux femmes. »

Jean-François DEBAT, Maire de Bourg-en-Bresse et Conseiller régional Auvergne-Rhône-Alpes

L’exposition débute avec les pionnières de cette période d’effervescence artistique. Leur accès à la formation et à la diffusion progresse, mais la parité est encore loin d’être acquise, accentuée par l’amnésie partielle de l’histoire de l’art.

Au fil du 19e  siècle, les femmes accèdent peu à peu à des formations artistiques autres que les ateliers familiaux, telles l’école spéciale de dessin, les académies Julian et Colarossi ou l’atelier de Rodin. L’École nationale des Beaux-Arts ne s’ouvre à elles qu’en 1897, grâce à l’Union des femmes peintres et sculpteurs, fondée en 1881 par la sculptrice Hélène Bertaux.

Cette même année, Hubertine Auclert organise la première manifestation féministe. L’État confie le Salon à la Société des artistes français, tandis que se multiplient d’autres salons et galeries.

Sous le Second Empire (1852-1870), les femmes présentent environ 14 % des œuvres du Salon mais celles qui accèdent à la reconnaissance, comme Rosa Bonheur, constituent l’exception. Bien qu’elles représentent 30% des artistes exposées dans les années 1890, elles continuent à faire l’objet de préjugés, de moqueries voire d’injures.

En 1893, l’Exposition universelle à Chicago réunit pour la première fois dans un Woman’s Building de nombreuses créatrices, parmi lesquelles Mary Cassatt ou Louise Abbema.

Lorsqu’elles sont enfin autorisées à concourir au Prix de Rome en 1903, il n’a déjà plus la même aura, symbole d’un académisme dépassé par les avant-gardes.

Si la Première Guerre mondiale marque un tournant pour l’émancipation des femmes, leur permettant d’accéder à des métiers jusque-là réservés aux hommes, leur chemin sera encore long avant d’être reconnues à égalité avec les hommes. Devant cette amnésie sélective de l’histoire de l’art, l’exposition « Valadon et ses contemporaines » révèle la richesse de leurs contributions à l’art moderne.

 

ŒUVRES EMBLEMATIQUES

Hélène Bertaux

(Paris, 1825 – Saint-Michel-de-Savaignes, 1909),

Jeune fille au bain ou Sarah la Baigneuse,

1873, Terre cuite, Chalon-sur-Saône, musée Vivant-Denon.

Cette œuvre, qui remporte la médaille de première classe au Salon officiel, atteste de la capacité des artistes femme en sculpture, domaine en majorité masculin. Hélène Bertaux fonde en 1881 l’Union des femmes peintres et sculpteurs, qui se bat pour l’égalité des droits dans le domaine artistique.

 

Mary Cassatt

(Allegheny, États-Unis, 1844 – Mesnil-Théribus, 1926),

Simone au chapeau bleu, vers 1900,

Gouache, Collection Thierry Pinault.

Mary Cassatt, artiste américaine installée en France, est l’une des meilleures représentantes de l’impressionnisme, aux côtés notamment de Berthe Morisot. La petite Simone, l’une de ses voisines, fut l’un de ses modèles préférés. La spontanéité de cette gouache restitue toute la tendresse du regard posé par l’artiste, qui restera elle-même sans enfant.

 

SUZANNE VALADON, ARTISTE MODERNE

Cette deuxième partie de l’exposition explore la figure majeure de Suzanne Valaon. Modèle et muse devenue artiste reconnue, elle est une figure emblématique de l’émancipation féminine au sein de la scène artistique parisienne.

Par son parcours hors du commun, elle bouscule les idées reçues sur les artistes femmes.

Fille naturelle d’une lingère du Limousin émigrée sur la butte Montmartre à Paris, rien ne prédestinait Marie-Clémentine Valadon à devenir une artiste accomplie. Modèle à partir de l’âge de 15 ans pour Puvis de Chavannes, Renoir ou Toulouse-Lautrec, elle multiplie les liaisons. En 1883 naît son fils Maurice, reconnu par le journaliste catalan Utrillo. On la surnomme Suzanne car elle pose nue pour des vieillards comme l’héroïne de l’Ancien Testament. Ayant remarqué son talent, Degas l’encourage et lui enseigne la gravure. Visitant les musées et dessinant sans cesse, elle se forme en autodidacte.

Commençant à peindre vers 1892-1893, elle expose dès 1894. Elle forme son fils Maurice Utrillo à la peinture. Son ami, André Utter, de vingt ans son cadet et également peintre, devient son amant, son modèle puis son mari. Leur représentation de face entièrement nus en Adam et Ève (1909) suscite le scandale.

En 1911, elle s’installe dans un nouvel atelier à Montmartre. Après une série de voyages, elle achète le château de Saint-Bernard (Ain) en 1923, où le trio puise son inspiration.

Défendue par plusieurs galeristes (Ambroise Vollard, Eugène Blot, Clovis Sagot Bernheim-Jeune ou Berthe Weill), elle est exposée à travers le monde. En 1937, un an avant sa mort, l’État français lui achète plusieurs œuvres.

Son style personnel, aux couleurs vives cernées de noir, aux corps modelés de façon vigoureuse, lui a valu d’être associée à une « mâle brutalité ». La postérité a longtemps relégué Valadon dans l’ombre de son mari et surtout de son fils, peintre en série de vues pittoresques montmartroises, au détriment de la grande artiste qu’elle fut.

 

Suzanne Valadon

(Bessines-sur-Gartempe, 1865 – Paris, 1938), Portrait de famille, 1912,

Huile sur toile, Paris, musée d’Orsay, dépôt au Musée national d’art moderne – Centre Pompidou.

Valadon vécut toute sa vie avec sa mère, qui éleva avec elle son fils naturel, Maurice Utrillo. Peintre à l’équilibre mental précaire, il est figuré ici en penseur mélancolique, réfugié sous la figure protectrice de sa mère. André Utter, le nouveau compagnon de Valadon, se tient derrière elle, regardant vers l’extérieur. Valadon se présente au centre comme la cheffe de famille, plantant son regard dans celui du spectateur et portant la main à son cœur.

 

Suzanne Valadon

(Bessines-sur-Gartempe, 1865 – Paris, 1938), Femme aux bas blancs, 1924, Huile sur toile, Nancy, musée des Beaux-Arts.

Ici au contraire Valadon reprend les codes de la représentation du corps féminin sous le regard masculin désirant. Malgré la pose ostentatoire de cette danseuse ou prostituée croisant ses jambes très haut et son maquillage outrancier, c’est avant tout un sentiment d’attente et de mélancolie qui se dégage de la représentation.

«Pour la première fois en France, cette exposition montre combien les femmes peintres et sculptrices ont été nombreuses et talentueuses, et comment elles ont contribué à l’effervescence artistique en France entre 1880 et 1940. Aucune exposition jusque-là n’avait réuni autant de créatrices de cette bouillonnante époque. »

Magali BRIAT-PHILIPPE, Responsable du service des patrimoines du monastère royal de Brou, conservatrice en chef du patrimoine

 

Suzanne Valadon

(Bessines-sur-Gartempe, 1865 – Paris, 1938), La Chambre bleue, 1923, Huile sur toile, Paris, Musée national d’art moderne – Centre Pompidou, dépôt au musée des Beaux-Arts de Limoges.

La Chambre bleue reprend la pose des Vénus alanguies de Titien et de Giorgione, ou de l’Olympia de Manet, dont le réalisme avait déjà fait scandale en son temps. Mais le modèle – sans doute une domestique de Valadon – est masculinisé par sa corpulence et sa cigarette. L’œuvre devient ainsi un manifeste de la femme contemporaine libre, affranchie du regard masculin.

 

Suzanne Valadon

(Bessines-sur-Gartempe, 1865 – Paris, 1938), Deux figures (après le bain), 1909, Huile sur carton, Paris, Musée national d’art moderne – Centre Pompidou.

Dans cette grande peinture, Valadon renouvelle le thème traditionnel des baigneuses. La solidité des corps, dont le dessin est souligné par un cerne de noir, se détache sur un fond vert uni.

Les deux poses des femmes, l’une s’enveloppant dans son peignoir, l’autre se reposant, lui permet en outre de créer des effets de drapés variés.

 

RESEAUX ARTISTIQUES : ETRE SOI PARMI LES AUTRES

Ces artistes femmes évoluent le plus souvent au sein de cercles de sociabilité favorisant les échanges artistiques. Cette section permet de découvrir les visages de celles qui s’affirmèrent souvent par le biais de l’autoportrait, mais aussi de leur entourage.

Au sein d’une société où la place de la femme n’est pas égale à celle de l’homme, l’autoportrait individuel ou collectif permet d’affirmer son identité d’artiste. Dans son célèbre portrait de groupe du Bateau-Lavoir, Marie Laurencin s’immortalise aux côtés d’Apollinaire, de Picasso et de la collectionneuse Gertrude Stein.

Contrairement à cette dernière, la mécène Eva Gebhard, baronne Gourgaud, soutient les artistes des deux genres. La marchande Berthe Weill, la première à défendre Picasso et Matisse, est aussi l’une des seules à exposer Suzanne Valadon, Émilie Charmy, Marie Laurencin, Jacqueline Marval ou Valentine Prax.

Depuis les années 1880, Paris est plus que jamais la capitale où affluent les artistes du monde entier. Là, les femmes se libèrent et contribuent à l’explosion artistique, concentrée d’abord sur la butte Montmartre puis dans le quartier de Montparnasse. Marie Vassilieff y fonde en 1911 l’Académie russe, puis durant la Première Guerre mondiale une cantine où se croisent tous les artistes émigrés.

Jusqu’en 1965, les femmes ne peuvent travailler sans l’autorisation de leur mari, d’où la proportion élevée d’artistes lesbiennes, célibataires ou épouses d’artistes. L’écrivaine Natalie Clifford Barney tient, avec sa compagne la peintre Romaine Brooks, un important salon intellectuel et artistique pendant plus de soixante ans.

Mais nombreuses sont les artistes femmes restées dans l’ombre d’hommes de leur entourage plus célèbres qu’elles. Ainsi Camille Claudel est-elle encore indissociable de son amant Rodin et de son frère Paul, écrivain et ambassadeur. Il fallut attendre les années 1980 pour que la force singulière de son œuvre soit redécouverte.

 

ŒUVRES EMBLEMATIQUES

Émilie Charmy

(Saint-Étienne, 1878 – Paris, 1974), Portrait de Berthe Weill, 1915-1920,

Huile sur toile, Bourg-en-Bresse, monastère royal de Brou.

Bien que moins connue que ses concurrents Vollard, Kahnweiler et Rosenberg, la marchande Berthe Weill est la première à vendre à Paris des toiles de Picasso et Matisse, lançant Modigliani, Dufy Vlaminck, Braque, van Dongen ou encore Utrillo. C’est également elle qui révèle des femmes comme Suzanne Valadon, Émilie Charmy, Marie Laurencin, Jacqueline Marval ou Valentine Prax. Émilie Charmy, qui s’affranchit assez vite du groupe fauve pour suivre sa propre voie, lui doit sa première exposition monographique.

 

Chana Orloff

(Starokonstantinov, Ukraine, 1888 – Tel Aviv, Israël, 1968), Amazone (Natalie Clifford Barney), 1916, Bronze, Paris, atelier Chana Orloff.

Chana Orloff représente ici de façon stylisée son amie Nathalie Clifford Barney (1876-1972), surnommée «l’Amazone» - telles ces femmes guerrières indépendantes de la mythologie grecque.

Elle tint un salon très important pour la vie artistique et intellectuelle pendant plus de soixante ans dans son «Temple de l’Amitié». La sculptrice avait réalisé une chouette monumentale pour le jardin, hélas fondue sous l’occupation allemande.

 

À L’ASSAUT DE LA MODERNITE : PARTICIPER AUX AVANT-GARDES

« Les femmes ont toujours eu une place d’exception au monastère royal de Brou, du fait de la remarquable personnalité de la fondatrice du monument, Marguerite d’Autriche. »

Philippe BELAVAL, Président du Centre des monuments nationaux

 

À priori cantonnées à être de simples muses ou reproductrices, et non des créatrices à part entière, de nombreuses femmes ont pourtant joué un rôle important dans l’explosion artistique française au tournant du 20e  siècle. Cette section de l’exposition confirme leur implication dans l’éclosion des avant-gardes, et ce dans tous les mouvements.

Bien que revendiquant leur modernité sociale et politique autant qu’artistique, les avant-gardes n’admettent les femmes qu’aux marges de leurs mouvements. Si l’impressionnisme est le premier groupe artistique à inclure une femme dès sa création avec Berthe Morisot, la figure du génie ne pouvait encore être que masculine. Elles sont pourtant nombreuses à avoir contribué à l’essor de la modernité.

Du groupe fauve avec lequel elle expose dès 1905, Émilie Charmy s’affranchit peu à peu. Jacqueline Marval, Sonia Lewitska ou Georgette Agutte s’inscrivent dans une veine post-impressionniste, revisitée par des styles originaux.

Les cubistes recensent le plus grand nombre de femmes, comme Alice Bailly, Alice Halicka, Maria Blanchard, Marevna ou Marie Vassilieff, mais parfois seulement pour une étape de leur carrière et avec la difficulté d’exister aux côtés des géants comme Braque et Picasso. C’est en se détachant du cubisme que Marie Laurencin forge son style inimitable.

La femme surréaliste est objet de désir ou de métaphores, et non sujet agissant. En 1933, la première exposition surréaliste réunit vingt hommes et seulement deux femmes : Marie-Berthe Aurenche et Valentine Hugo. Leonor Fini se lie à Man Ray, Éluard et Ernst, mais n’intègre jamais officiellement le groupe.

L’atelier moderne, où Fernand Léger enseigne aux côtés de sa compagne Nadia Khodossiévitch, forme des artistes venues de toute l’Europe, telles Marcelle Cahn. L’abstraction, inventée par la Suédoise Hilma af Klint au début du 20e  siècle, se diffuse peu à peu en France, notamment sous l’impulsion des couples Arp et Delaunay, si étroitement associés qu’ils partagent la même identité artistique

 

ŒUVRES EMBLÉMATIQUES

Valentine Hugo

(Boulogne-sur-Mer, 1887 – Paris, 1968), Portrait de Pablo Picasso (Malaga, 1881 – Mougins, 1973), octobre 1934 - octobre 1948, Huile sur contreplaqué, Paris, Musée national d’art moderne – Centre Pompidou.

Proche d’André Breton et de Paul Éluard, Valentine Hugo participe aux premières expositions du groupe surréaliste. Elle réalise de nombreux portraits oniriques, dont celui-ci, de Pablo Picasso. Auréolé d’un thème astral, le maître espagnol tient ici les cornes d’un taureau dont la tête prend la forme d’un étrange appareil génital féminin.

 

Sophie Taeuber-Arp

(Davos, Suisse, 1889 – Zurich, Suisse, 1943), Construction géométrique, vers 1942, Relief en bronze, Strasbourg, musée d’Art moderne et contemporain.

Travaillant étroitement avec son mari Jean Arp, Sophie Taeuber-Arp est la première artiste en Suisse à recourir à la géométrie puis à l’abstraction, tant en peinture qu’en sculpture. S’inspirant du Constructivisme russe, elle joue dans ce relief avec les notions de continuité et d’emboitement.

 

DES SUJETS FEMININS ?   DE L’INTERIEUR VERS L’EXTERIEUR

«L’exposition d’une centaine d’œuvres, et autant de chefs-d’œuvre, sera une révélation pour beaucoup. Elle souligne le rôle méconnu des femmes dans les révolutions artistiques au tournant des 19e  et 20e  siècles. »

Pierre-Gilles GIRAULT, Administrateur du monastère royal de Brou, conservateur en chef du patrimoine

 

Cette section de l’exposition dévoile les sujets dont se saisissent les artistes femmes de cette époque. Diffèrent-ils de ceux choisis par les hommes ?

L’art délicat des fleurs, des scènes d’intérieur et des thèmes sentimentaux, auxquels on les a longtemps cantonnées, se poursuit-il à l’époque où les académismes volent en éclats ?

De la traditionnelle Vierge à l’Enfant, Marthe Flandrin tire une peinture épurée et Chana Orloff une sculpture dépouillée de toute connotation religieuse, rendant ainsi universel ce sujet de la maternité. Le bouquet de fleurs, genre traditionnellement attribué aux femmes, prend de l’audace en devenant érotique et mystique sous les pinceaux de Tamara de Lempicka et Séraphine de Senlis. De même, lorsque Valadon illustre une scène d’intérieur, c’est avec son style charpenté et coloré, loin de la douceur perçue comme « féminine ».

Dans La Fuite d’une mère fuyant la guerre son enfant dans les bras lors du grand exode de 1940, Lempicka restitue son émotion face aux grands bouleversements de son temps, sortant de son univers privilégié pour aller à la rencontre de l’Histoire. D’autres artistes voyageuses représentent des peuples extra-européens, avec humanité et sans sacrifier à un exotisme facile.

Le spectacle vivant offre une inépuisable source d’inspiration. Certaines artistes créent d’ailleurs des décors de théâtre ou d’opéra, notamment pour les Ballets russes. En représentant des « lieux de débauche », cafés, cabarets, voire bordels, Henriette Deloras ou Lou Albert-Lasard rompent également avec les convenances imposées à leur sexe. Ne s’y aventurent guère que des femmes appartenant aux milieux artistiques et intellectuels, qui s’offrent ainsi la même liberté de mœurs que leurs homologues

 

ŒUVRES EMBLEMATIQUES

Tamara de Lempicka

(Varsovie, Pologne, 1898 – Cuernavaca, Mexique, 1980), La Fuite ou Quelque part en Europe, 1940, Huile sur toile, Nantes, musée des Beaux-Arts.

Ce tableau fait référence à la Fuite en Égypte et met cette scène biblique en parallèle avec le contexte de guerre en Europe : Tamara de Lempicka a fui avec sa famille pour rejoindre les États-Unis en 1939. Les raisons de cette fuite sont finalement les mêmes, échapper à un massacre.

 

Séraphine Louis, dite Séraphine de Senlis

(Arsy, 1864 – Villers-sous-Erquery, 1942), Bouquet de fleurs sur fond rouge, vers 1925-1930, Huile sur toile Collection particulière ; Paris, courtesy galerie Dina Vierny.

Appelée à peindre par des voix entendues dans la cathédrale de Senlis, Séraphine Louis était d’une condition extrêmement modeste qui ne la destinait pas à la peinture. L’horreur du vide et l’ambiguïté sexuelle hantent ses bouquets foisonnants, mystiques et naïfs, dont la beauté primitive a séduit le grand marchand Wilhelm Uhde.

 

LE NU, AU FEMININ ET AU MASCULIN

L’étude et la représentation de corps nu, surtout d’après modèle vivant, a longtemps constitué l’ultime interdit pour les femmes artistes. À l’aube du 20e siècle, elles s’emparent toutefois de ce sujet capital, n’hésitant pas à en assumer la charge sensuelle. Cette dernière section de l’exposition marque cette étape cruciale dans l’émancipation des femmes artistes de cette époque.

De modèle passif à l’artiste agissante faisant poser ses modèles, le parcours de Valadon est caractéristique de l’émancipation des artistes femmes à l’aube du 20e  siècle.

Par souci des convenances sociales, l’étude de l’anatomie et du modèle vivant nu, a fortiori masculin, leur est longtemps proscrite, leur interdisant ainsi l’accès à la grande peinture d’histoire. Elles étudient par défaut la statuaire antique, mais Constance Mayer déchaîne tout de même la critique en représentant Vénus et Cupidon nus au Salon de 1806. Ce n’est qu’en 1901 que l’École nationale des Beaux-Arts leur accorde enfin ce droit, toutefois dans une classe non mixte.

Pour le nu féminin, elles utilisent leur propre reflet dans le miroir. Émilie Charmy, Suzanne Valadon et l’Allemande Paula Modersohn-Becker sont les pionnières de ces autoportraits nus d’une grande sincérité. L’Idée fixe de Germaine de Roton semble refléter son esprit fragile, au contraire des corps solides sculptés par Jeanne Bardey et Marguerite Peltzer.

En posant leur regard sur d’autres corps féminins, elles inversent les rôles habituels. Jacqueline Marval reprend audacieusement le thème du harem, fantasme masculin par excellence. Les deux femmes partageant le même fruit peintes par Georgette Agutte préservent une certaine ambiguïté. L’homoérotisme est assumé chez Émilie Charmy, qui représente son amie Colette en tenue d’Ève.

La transgression ultime concerne le nu masculin, surtout s’il inspire le désir. Camille Claudel doit ainsi couvrir les deux danseurs de sa Valse, incarnant l’amour charnel qui l’unit à Rodin. À rebours, Marie Vassilieff ou Chana Orloff géométrisent les corps, les dépouillant de tout érotisme et les rendant d’une certaine façon androgynes.

 

ŒUVRES EMBLEMATIQUES

Émilie Charmy

(Saint-Étienne, 1878 – Paris, 1974), Jeune femme nue, 1921, Huile sur toile,

Paris, galerie Bernard Bouche.

Dans les années 1920, Émilie Charmy réalise d’extraordinaires nus féminins, célébrés par les écrivains de l’époque. Colette écrit ainsi de Charmy qu’elle est la «servante magistrale d’une chair féminine», au «pinceau subtil, sans artifices et guidé par une lucide passion». La peintre représentera à plusieurs reprises son amie et amante.

 

Camille Claudel

(Fère-en-Tardenois, 1864 – Montdevergues, 1943), La Valse, 1883-1905 (fonte 1990), Bronze, Nogent-sur-Seine, musée Camille Claudel.

Dans la Valse, Camille Claudel immortalise dans un tourbillon l’amour charnel qui l’unit à Rodin, passion destructrice qui lui fera perdre la raison. Cette œuvre majeure, créée pour la première fois en 1883, suscite le scandale, car évoquant le désir réciproque et sensuel des deux danseurs. Afin de pouvoir l’exposer, Claudel drape une partie du corps de la danseuse.

 

POUR EN SAVOIR PLUS

Commissariat

Magali Briat-Philippe, responsable du service des patrimoines du monastère royal de Brou, conservatrice en chef du patrimoine Anne Liénard, directrice du musée des Beaux-Arts de Limoges, conservatrice du patrimoine

 

Conseillères scientifiques, autrices

Nathalie Ernoult, docteure en Histoire, attachée de conservation, Musée national d’art moderne – Centre Pompidou, Paris

Charlotte Foucher-Zarmanian, docteure en Histoire de l’art, chargée de recherches, CNRS, laboratoire LEGS (UMR 8238)

Marianne Le Morvan, docteure en Histoire de l’art, enseignante, chercheuse et commissaire d’expositions

Lena Pfeiffer, doctorante en Histoire de l’art, Technische Universität, Dresde, Allemagne

 

Remerciements

Le monastère royal de Brou et le musée des Beaux-Arts de Limoges expriment leur gratitude à toutes les personnes qui ont rendu possible la réalisation de cette exposition. L’exposition au monastère royal de Brou à Bourg-en-Bresse n’aurait pu voir le jour sans la collaboration active des équipes du monument. Un grand merci à l’ensemble d’entre eux !

Les commissaires tiennent à exprimer leur reconnaissance aux prêteurs :

Boulogne-Billancourt, musée des années Trente, Bourg-en-Bresse, monastère royal de Brou, Caen, musée des Beaux-Arts, Cambrai, musée des Beaux-Arts, Chalon-sur-Saône, musée Denon, Courbevoie, musée Roybet-Fould, Dijon, musée des Beaux-Arts, Grenoble, musée de Grenoble, Guéret, musée d’art et d’archéologie, Limoges, musée des Beaux-Arts,Lyon, galerie Michel Descour, Lyon, musée des Beaux-Arts, Thierry Pinault, Maryse et Max Maréchal, Nancy, musée des Beaux-Arts, Nantes, musée d’arts, Nogent-sur-Seine, musée Camille Claudel, Paris, atelier Chana Orloff, Paris, Centre national des arts plastiques, Paris, Galerie Bernard Bouche, Paris, galerie Christian Le Serbon, Paris, galerie Françoise Livinec, Paris, galerie Hélène Bailly, Paris, musée de Montmartre, Paris, musée d’Orsay, Paris, Fondation Dina Vierny-Musée Maillol, Paris, Musée national d’art moderne – Centre Pompidou, Paris, Petit Palais: musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris,Poitiers, musée Sainte-Croix, Saint-Étienne, musée d’Art contemporain, Strasbourg, musée d’art moderne et contemporain, Thonon-les Bains, musée du Chablais, Villefranche-sur-Saône, musée Paul Dini, Voiron, musée Mainssieux,

Ainsi qu’aux collectionneurs privés souhaitant conserver l’anonymat.

Le Musée des Beaux-Arts de Limoges

L’exposition « Valadon et ses contemporaines / Peintres et sculptrices, 1880 - 1940 » a été organisée en partenariat avec le BAL – Musée des Beaux-Arts de Limoges. Le musée des Beaux-Arts de Limoges, installé au pied de la cathédrale dans le quartier historique de la Cité, occupe depuis 1912 l’ancien palais épiscopal édifié à la fin du XVIIIe  siècle, situé au cœur de jardins dominant la vallée de la Vienne et classé Monument historique. Les collections sont réparties en quatre grands pôles : la collection d’Émail (XIIe  siècle à nos jours) assure la singularité et la renommée du musée ; les Beaux-Arts, avec des peintures de la Renaissance aux grands maîtres du XXe  siècle ; une collection d’Antiquités égyptiennes riche de près de 2 000 pièces ; et enfin, l’Histoire de Limoges depuis sa création à l’époque gallo-romaine jusqu’au début du XXe  siècle. MBA - Limoges 1, place de l’Evêché 87000 Limoges museebal.fr -

 

CATALOGUE DE L’EXPOSITION

Direction de la publication Magali Briat-Philippe, responsable du service des patrimoines du monastère royal de Brou, conservatrice en chef du patrimoine

Anne Liénard, directrice du musée des Beaux-Arts de Limoges, conservatrice du patrimoine Coédition :

In Fine Éditions, les villes de Bourg-en-Bresse et Limoges Format : 25x28 cm 208 pages, 230 illustrations

Prix : 29 euros, Paris, 2020 ISBN : 978-2-902302-81-9 Dépôt légal : mai 2020

 

POUR EN SAVOIR PLUS

https://fr.wikipedia.org/wiki/Monast%C3%A8re_royal_de_Brou

Le monastère royal de Brou est un complexe religieux situé à Bourg-en-Bresse dans l'Ain, une des capitales de l'ancien duché de Savoie. Ses bâtiments monastiques abritent le musée municipal de Bourg-en-Bresse.

 

CYCLE DE CONFERENCES EN LIGNE INSCRIPTION OBLIGATOIRE PAR MAIL À

brou@bourgenbresse.fr (sauf conférence du 29.05)

Berthe Weill, marchande d’art de l’avant-garde Pionnière de l’art moderne et l’une des marchandes d’art les plus influentes du 20e  siècle, elle a révélé toute une génération d’artistes au grand public.

Être et s’affirmer en tant qu’artiste : une brève histoire de l’autoportrait féminin Au tournant des 19e  et 20e  siècles, les femmes artistes luttent ardemment pour être reconnues comme des créatrices à part entière. Par Magali Briat-Philippe, Conservatrice en chef, responsable des patrimoines du monastère royal de Brou

 

LES RENDEZ-VOUS AUTOUR DE L’EXPOSITION

Visite à Saint-Bernard, samedi 19 juin à 14h30 RÉSERVATION AU 04 74 32 07 31

Sur les pas de Suzanne Valadon : une excursion à Saint-Bernard, village en bord de Saône, où Suzanne Valadon séjournait régulièrement avec son mari André Utter et son fils, Maurice Utrillo. Organisée en partenariat avec l’association Patrimoine des pays de l’Ain.  Tarif : 5€ (gratuit -12 ans)

 

INFORMATIONS PRATIQUES

Au programme de cette réouverture, deux expositions temporaires prolongées jusqu’en septembre, des visites commentées, des rendez-vous en famille, conférences, ateliers de pratiques artistiques… Découvrez le programme de ces prochaines semaines !

 

Monastère Royal de Brou

www.monastere-de-brou.fr

63 boulevard de Brou

01000 Bourg-en-Bresse

04 74 22 83 83

brou@bourgenbresse.fr

 

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