FILMER LA MATIÈRE, RÉVÉLER LES SAVOIR-FAIRE

PAVILLON DE L’ARSENAL

EXPOSITION PRÉSENTÉE JUSQU'AU 29 MAI 2022

Recherche menée par Timothée Gauvin, architecte et Antoine Plouzen Morvan, vidéaste, dans le cadre de FAIRE, accélérateur de projets architecturaux et urbains innovants

Longtemps la nature francilienne a défini l’identité des rues et la couleur des architectures parisiennes. Le grès de Fontainebleau pour paver, le calcaire de l’Oise pour ériger, le gypse de Seine-Saint Denis pour protéger, les feuillus pour charpenter, couvrir, habiter et structurer… Si ces gisements existent toujours, ils ont souvent disparu du vocabulaire de la construction contemporaine parisienne, remplacés par des produits importés et des techniques exogènes.

Réalisée dans le cadre de FAIRE, programme de recherche par le projet, la manifestation Ressources souhaite retisser le lien entre matière première et forme urbaine, entre architecture et terroir. L’architecte Timothée Gauvin et le vidéaste Antoine Plouzen Morvan filment les filières de TERRE, PIERRE, PLÂTRE ET BOIS métropolitaines. Leurs vidéos révèlent les carrières et la diversité du climax francilien. Elles ouvrent les portes de lieux méconnus de transformation : ateliers, scieries, plâtreries… Elles témoignent de métiers, de pratiques et d’outils immuables qui dialoguent avec les techniques industrielles et des sciences émergentes, utilisant des savoirs transmis et réinventés.

Dans une scénographie immersive, l’exposition donne à voir, au travers de quatre projections spectaculaires et pédagogiques, la métamorphose de la matière en matériau. Mises en regard, les matières sont exposées dans les différentes phases de leur transformation : de la grume à la poutre, du bloc au moellon, de la poudre à la plaque...  au côté des outils nécessaires à leur transformation. Réalisée grâce au soutien de professionnels engagés, l’exposition dresse une carte que les auteurs nomment « material memory map »*, qui dessine et documente la métamorphe des matières sur un rayon de 99 km autour de Paris. 

Avant de participer à la construction d’un édifice, tout matériau est d’abord une partie de territoire. Un élément prélevé, transformé, transporté plus ou moins loin pour être assemblé. Ceux utilisés aujourd’hui sur les chantiers franciliens proviennent généralement d’ailleurs, de France, d’Europe ou de l’autre côté du globe. Vendus sur catalogue, emballés, étiquetés ils nous affranchissent de leurs origines, nous font oublier leur nature, les moyens mis en œuvre pour les fabriquer et l’énergie pour les envoyer à destination. Ce faisant, ils perdent leur valeur et l’architecture oublie sa géographie.

Comme dans tous les domaines, les enjeux contemporains nous invitent à relier ce que l’on consomme avec ceux qui le produisent, ce que l’on achète à son territoire d’origine. C’est l'ambition de la manifestation Ressources que de dresser cet inventaire raisonné du terroir pour donner à voir le patrimoine matériel et immatériel métropolitain et de permettre à tous, en particulier aux étudiants et futurs professionnels, les outils pour écrire une nouvelle étape d’architecture vernaculaire.

PIERRE

La richesse géologique du Bassin parisien se traduit tant par le nombre de ses carrières que par la diversité des minéraux qui en sont extraits et leurs multiples usages : plâtres et ciments, verrerie, céramiques, etc. Sur la centaine de lieux d’extraction existants, une quinzaine exploitent encore de la pierre calcaire directement destinée à la construction et une seule du grès à paver.

Installée sur le site de Moigny-sur-École, à une cinquantaine de kilomètres au sud de la capitale, la carrière de grès de Fontainebleau couvre une superficie de 5 000 m2, dont 2 000 m2 exploitables. Ici, aujourd’hui comme hier, la quasi-totalité du travail s’effectue à la main, à l’œil et à l’oreille. Il faut, selon les carriers, écouter le grès « chanter » en le frappant pour évaluer sa qualité et anticiper son usage futur.

Depuis 1987, cette carrière relance une filière historique progressivement remplacée par celles des granits bretons puis asiatiques. Si le grès extrait sert principalement à fournir les pavés nécessaires aux réhabilitations historiques, comme récemment au Louvre, au château de Versailles ou aux Invalides, le calcaire du Lutétien présent dans d’autres carrières franciliennes permet de continuer à bâtir. S’il reste aujourd’hui moins de dix exploitations de calcaire en activité au sud de l’Oise, dont les carrières Violet depuis 1963, l’étude « Pierre » menée en 2018 estimait que la capacité totale du Bassin parisien permettrait de produire de 6 000 à 9 000 logements en pierre massive chaque année. Facile à travailler, l’utilisation de la pierre dépend de la profondeur de son extraction qui en fait la qualité, de la plus dure à la plus tendre, du liais à la franche, de la fine à la Saint-Leu.

BOIS

Selon le dernier recensement réalisé par l’Inventaire forestier national en 2020, l’Île-de-France compte 269 000 ha (±10 000 ha) de forêt, soit un taux de boisement de 22 %. Ce taux est inférieur de 7 points à la moyenne nationale et la répartition des zones boisées sur ce territoire est inégale du centre à la périphérie, avec la présence de deux gros massifs à Fontainebleau et Rambouillet. Plus nettement encore que dans d’autres régions, cette forêt, à la croisée d’influences biogéographiques diverses, se caractérise par la dominante presque exclusive des feuillus qui représentent 93 % du volume sur pied. Trois essences prédominent : le chêne rouvre (12 Mm3 ± 2 Mm3), le chêne pédonculé (±7 Mm3) et le châtaignier (±6 Mm3). Viennent ensuite le frêne (± 4 Mm3), le charme (± 3 Mm3), puis les bouleaux, tremble, hêtre, robinier faux-acacia, tilleul et autres feuillus précieux. Le volume de conifères reste particulièrement faible, seul le pin sylvestre atteint un seuil significatif de ± 2 Mm3.

De l’arbre au produit fini, la filière bois est constituée de neuf activités, de la sylviculture et l’exploitation forestière à la construction en passant, par le sciage et le travail du bois ou l’industrie du papier et du carton (hors bois destiné à l’énergie). La construction en bois représente environ 13 % des effectifs du cœur de la filière. Dernière scierie en activité, l’entreprise Roëser travaille à 90 % le bois de chêne qu’elle achète sur pied à des propriétaires, ou à l’Office national des forêts, pour les prélever, débarder, transporter jusqu’à la scierie.

L’entreprise a pour spécificité de réaliser sur-mesure planches et poutres pour ses clients charpentiers comme Les Charpentiers de Paris

PLATRE

Le territoire de L’Île-de-France est caractérisé par la  pureté et l’épaisseur exceptionnelle (jusqu’à 33 mètres)  du gisement de gypse qui occupe ses sous-sols. Historiquement « pierre à plâtre », chimiquement « sulfate de calcium », le gypse est une roche évaporitique extraite, broyée, puis cuite, pour donner le produit fini appelé plâtre. Le bassin concentre près de deux tiers des gisements français, dans deux types de carrières, souterraines ou à ciel ouvert. Ces dernières, aux minéraux de qualités mixtes, sont utilisables à 100 %. Les carrières souterraines, comme celle du massif de Montmorency, la plus grande d’Europe, proposent le gypse le plus pur.

À quelques kilomètres, Les Plâtres Vieujot, créés en 1880, sont installés depuis 1947 sur un site où la production est attestée depuis 1462. Dernier fabricant indépendant, l’entreprise familiale produit exclusivement du plâtre en poudre destiné à la restauration du patrimoine, aux stucs, plâtres décoratifs et à l’écoconstruction. En parallèle de cette production artisanale existe une production industrielle. Depuis 1948, l’entreprise Placoplatre réalise, à Vaujours en Seine-Saint-Denis, la transformation du gypse en plâtre de moulage, carreaux de plâtre et surtout plaques de cloisonnement. Exploitant les caractéristiques techniques du matériau (grande résistance au feu, régulation hygrométrique, très bonne isolation thermique et acoustique), ces plaques sont massivement utilisées en construction.

TERRE

Depuis plus de 10 000 ans, la terre est le matériau universel de construction. Un tiers de l’humanité vit aujourd’hui encore dans des édifices en terre, et la France possède un grand patrimoine architectural bâti en argile crue ou cuite. Depuis 1856, les briqueteries deWulf d’Allonne et de Sommereux traversent les âges et utilisent les sous-sols argileux du Bassin parisien pour produire enduits, pavages, tuiles et briques crues ou cuites. Selon les sites d’extraction et le mélange de terre, la capacité mécanique, mais aussi la couleur des produits obtenus évoluent : du rouge qui vient de la teneur en fer du limon argileux (appelé aussi limon des plateaux), aux accords gris-roses de la terre du pays de Bray. Les formulations issues de cette diversité de terres définissent la qualité et la stabilité du matériau fini.

Au regard de l’exploitation de ces gisements argileux, l’usine Cycle Terre, ouverte en 2021 à Sevran, cherche à réutiliser et valoriser de façon innovante les argiles excavées lors de la réalisation de fondations, de terrassements… À la suite de protocoles d’évaluation scientifiques, l’enjeu est de transformer ces terres et gravats en enduits, blocs de terre comprimée et demain en panneaux d’argile de doublage. La terre crue a pour avantage d’avoir un très faible bilan carbone et d’offrir une atmosphère intérieure saine sans composé organique volatil (COV).

Ses propriétés physiques perspirantes en font un régulateur hygrométrique naturel et son inertie garantit une bonne régulation de la température intérieure. Elle peut être utilisée en parement ou en remplissage, en association avec d’autres matériaux, pour bénéficier des qualités de chacun.

COMMISSAIRES

TIMOTHEE GAUVIN, ARCHITECTE

Timothée Gauvin est architecte. Diplômé de l’École d’Architecture de la Ville et des Territoires à Marne-la-Vallée, il a travaillé au sein d’agences suisses et anglaises (Herzog & de Meuron, 6a Architects, Turner Works)  avant la création de son agence à Paris en 2018. Début 2019, dans le cadre de sa pratique professionnelle, il crée le projet materialmemorymap qui entreprend de faire l’inventaire des savoir-faire et des matières premières du bassin parisien liées à l’activité d’architecture, positionnant cette démarche comme un outil primordial du processus de projet d’architecture et de compréhension des enjeux liés à l’acte de bâtir.

ANTOINE PLOUZEN MORVAN, VIDEASTE

Antoine Plouzen Morvan est réalisateur, monteur et chef opérateur. Autodidacte, il commence très jeune chez France Télévision en post-production. Il s’engage ensuite dans une démarche surtout documentaire en travaillant aussi bien avec des réalisateur.trice.s que des artistes ou des architectes. Il collabore ainsi à des œuvres projetées au Centre Pompidou, au Salon de Montrouge, à la Biennale d’Istanbul, à l’Opéra de Paris ou au Festival de Cannes. Dès 2019, il collabore avec Timothée Gauvin sur le projet Material Memory Map, en réalisant des courts-métrages montrant la fabrication des matériaux de construction.

PROGRAMMATION AUTOUR DE L’EXPOSITION

Visite guidée avec les commissaires Les samedis 2 avril et 21 mai à 15h.

Visites guidées et rencontre avec les commissaires de l’exposition Timothée Gauvin, architecte, et Antoine Plouzen Morvan, videaste, pour découvrir les filières TERRE, PLÂTRE, BOIS et PIERRE franciliennes et comprendre les étapes et savoir-faire nécessaires à la métamorphose de la matière en matériau.

Gratuit, inscription en ligne sur htpps://www.pavillon-arsenal.com

Visites guidées les week-end Les samedis et dimanches à 15h

Laissez-vous guider tous les week-ends par nos médiateurs, étudiants des Écoles nationales supérieures d’architecture dans l’exposition « Ressources - Filmer la matière, révéler les savoir-faire » pour une visite commentée gratuite.

Nocturne Le jeudi 12 mai à 19h (sous réserve)

Nocturne autour de l’exposition « Ressources - Filmer la matière, révéler les savoir-faire » et rencontre avec Timothée Gauvin, architecte et co-comissaire, au coeur d’une scénographie immersive combinant projections grands formats de films sur chaque filière et installation des matières dans les différentes phases de leur transformation : de la grume à la poutre, du bloc au moellon, de la poudre à la plaque…

Accueil et visites pour les groupes

En semaine ou le week-end, les groupes sont les bienvenus ! Afin de vous recevoir dans les meilleures conditions, contactez-nous à l’adresse mail ci-dessous pour trouver un créneau qui vous convienne et organiser avec vous votre venue.

Durée des visites : 1h - 1h30

Inscription et infos sur http://infopa@pavillon-arsenal.com et http://pavillon-arsenal.com

POUR EN SAVOIR PLUS

https://www.pavillon-arsenal.com/fr/expositions/12395-ressources.html

CENTRE D'INFORMATION, DE DOCUMENTATION ET D'EXPOSITION D'URBANISME ET D'ARCHITECTURE DE PARIS ET DE LA MÉTROPOLE PARISIENNE

Exposition créée par le Pavillon de l'Arsenal

Les commissaires scientifiques et le Pavillon de l’Arsenal remercient tout particulièrement :

Marie Aeberli, Anastasia Andrieu, Sarah Arlandis, Gerald Bihan, Jean-Marc Besombes, Dimitri Brejou, Jérôme Couatarmanac’h, Grégoire Deberdt, Cédric Desbonnes, Christophe Dewulf, Bertrand Douine, Teddy Dusausaye, Michel Draucourt, Francisco De Oliveira, Vincent Farion, Mahamadou Fofana, Jean-Baptiste Gauvin, Saba Ghorbanalinejad, Christopher Heymann, Hokuto Iseki, Léonard Kadid, Nesma Krim, Armand et Fabrice de Laubrière, Sophie Mambrini, Philippe di Mascio, Dominique Mateos, Natália Peťková, Nathalie Piochon, Marc Potin, Teddy Remaud, Julien Simon, Olivier Sladky, Marc Verrecchia, Frank Violet, Élodie Wallers, Lénine et William et toutes les figures anonymes de ces images

INFORMATIONS PRATIQUES

PAVILLON DE L’ARSENAL

https://www.pavillon-arsenal.com/fr/infos-pratiques/

21, BLD MORLAND 75004 PARIS

+33 1 42 76 33 97

INFOPA@PAVILLON-ARSENAL.COM

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